Beate Teresa Hanika, Le Goût sucré des souvenirs



Elisabetta Shapiro est une vieille dame qui vit seule dans sa maison de famille en plein cœur de Vienne, perdue dans ses souvenirs. Les bons, ceux de la jeunesse et de l'insouciance, des beaux jours et des premières amours, des rires de ses sœurs et des étés. Mais les pires aussi. Les années 1930 et la montée du nazisme, l'arrestation de sa famille, la perte et la solitude, les immenses brutalités de l'Histoire et les irréparables chagrins. Tout ce qu'Elisabetta ne peut oublier, terrassée par le dilemme des rescapés. Jusqu'à ce que Pola, jeune danseuse à l'Opéra, emménage chez elle, bousculant profondément ses habitudes. Malgré leurs différences, les deux femmes vont peu à peu se rapprocher et nouer des liens plus forts qu'elles ne l'auraient imaginé (quatrième de couverture).

"La vieillesse ne m'a pas surprise. Je m'attendais à ce qu'elle déferle sur moi, comme une pluie diluvienne qui emporte, noie et éteint tout sur son passage. Mais elle est venue si furtivement qu'aujourd'hui encore, certains jours, je suis stupéfaite par mon propre reflet".

Le goût sucré des abricots est pour Elisabetta ce qu'était la madeleine pour Proust. Une réminiscence qui la transporte dans son passé de jeune fille juive dans la Vienne de la Seconde Guerre Mondiale et la replonge dans l'histoire tragique qui a fait d'elle l'unique survivante de la rafle de sa famille. Aujourd'hui, l'octogénaire survit entre la préparation obsessionnelle de sa confiture et les visites régulières des fantômes de ses sœurs défuntes.
Dans sa maison familiale, elle accueille aussi depuis peu Pola, jeune ballerine viennoise. Une hôte bien réelle dont l'histoire personnelle rejoint bientôt la sienne : Pola était l'amoureuse de la petite-fille d'Elisabetta. Un deuxième drame se dessine alors au fil des souvenirs entremêlés des deux femmes. Pour continuer, Pola aura besoin du soutien, de la compréhension et du pardon d'Elisabetta. Celle-ci qui a tant souffert sera-t-elle en mesure de les lui accorder ? Une grande leçon d'humanité servie par un style parfois alambiqué, mais finalement percutant.

Beate Teresa Hanika, Le Goût sucré des souvenirs, Pocket, 2019♥♥♥♥ 


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